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Robert Lighthizer, l’homme qui pousse Donald Trump à la guerre commerciale

Dans l’équipe Trump, on connaît le colistier, J. D. Vance, 40 ans, qui a grandi au sein d’une famille dysfonctionnelle, avec une mère toxicomane, dans la petite ville de Middletown, dans l’Ohio, aujourd’hui désindustrialisée. On connaît moins Robert Lighthizer, beaucoup plus âgé puisqu’il a 77 ans, mais lui aussi originaire de l’Ohio. Né à Ashtabula, au bord du lac Erié, l’ancien représentant au commerce de Donald Trump n’en finit pas de pleurer un monde révolu, celui où l’Amérique industrieuse produisait tout ce qu’elle utilisait.
« Quand j’étais jeune, ma ville natale était une ville américaine ordinaire, prospère et animée, l’une des nombreuses villes de ce type. » Mais, déplore-t-il dans son livre No Trade is Free (« aucun échange n’est gratuit », HarperCollins, 2023, non traduit), « de nos jours, les wagons-trémies ne déchargent plus beaucoup de minerais de fer, car de nombreux emplois dans l’industrie sidérurgique ont été délocalisés à l’étranger. Les emplois manufacturiers qui soutenaient l’industrie automobile à Detroit ont également diminué ». M. Lighthizer a la nostalgie des années Reagan, lorsque le président taxait les motos japonaises pour protéger l’américain Harley-Davidson, et voit dans la création de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), et surtout dans l’adhésion de la Chine à l’OMC, en 2001, et dans l’accord Canada-Etats-Unis-Mexique de libre-échange, en 2020, la cause des malheurs de l’Amérique.
Il prépare son retour, au même poste ou peut-être à celui de secrétaire au Trésor, plaidant dans son livre pour un découplage quasi complet avec la Chine, ne plus octroyer à la Chine les avantages donnés aux autres membres de l’OMC et un commerce extérieur américain à l’équilibre. Pour cela, il prône une dévaluation du dollar et l’instauration d’un mécanisme pour compenser la TVA inexistante aux Etats-Unis et qu’il assimile à une taxe européenne sur les importations.
Discret, peu avenant, l’homme est dans l’entourage direct de Donald Trump : il a déménagé à Palm Beach, en Floride, à deux pas du resort néomauresque de Mar-a-Lago de l’ancien président et est administrateur « indépendant » de Trump Media, qui possède le réseau Truth Social. Comme l’écrivait dans la revue Le Grand Continent, en mai, Renaud Lassus, représentant de Bercy à l’ambassade de France à Washington pendant le premier mandat Trump, « Bob Lighthizer apporte une approche conceptuelle, analytique et professionnelle au service d’un patron qui n’en a pas ».
Pour l’heure, il porte la parole de Trump à Wall Street : celle d’un prélèvement douanier de 10 % sur toutes les importations et de 60 % sur celles en provenance de Chine ainsi que la renégociation des accords avec le Canada et le Mexique, en 2026, comme le permet une clause de revoyure. Wall Street commence à prendre l’affaire au sérieux. « L’ancien représentant américain au commerce de Trump Robert Lighthizer a rencontré des groupes d’investisseurs et leur a dit que Trump pourrait annoncer des droits de douane chinois de 60 % et des droits de douane généraux de 10 % peu après son entrée en fonction », écrit la firme d’analyse financière Piper Sandler, qui ajoute : « Nous nous attendons à ce que les tarifs douaniers soient imposés plus rapidement lors d’un second mandat de Trump que lors du premier. » La guerre commerciale déclenchée par Donald Trump n’avait commencé qu’en 2018, un an après son arrivée à la Maison Blanche, mais elle devrait survenir beaucoup plus brutalement s’il était réélu en novembre.
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